" Nul n'est censé ignorer la Loi"
Dans notre charmant pays, il y a 8 000 lois et plus de 110 000 décrets en vigueur!
Et nul n'est censé les ignorer dans l'absolu, pour ne pas invoquer, en cas de poursuites au tribunal, l'ignorance d'un texte afin d'éviter d'être sanctionné, et oui, sinon ça serait trop facile...
"Oups, désolé Monsieur le juge, je ne savais pas...Je peux rentrer à la maison?"
Toutefois, même le plus valeureux des juristes ne pourrait connaître par coeur autant de textes, alors imaginez le citoyen lambda...
En conséquence, se pose la question rhétorique: obéir ou désobéir?
En théorie, nous devons obéir aux lois pour pouvoir vivre en société, sinon on marcherait très vite sur la tête.
Les lois sont donc, normalement créées dans le but du bien commun et seront toujours injustes pour certains. On se soumet à l'autorité en niant totalement son individualité.
On retrouve ici la position de Pascal, qui affirmait que nous sommes tenus d'obéir à toute loi, même injuste, au risque de générer un désordre qui entrainerait des conflits. C'est aussi Socrate qui buvait sa ciguë sans s'y opposer.
Cette obéissance aveugle est très largement illustrée lors de la sombre période la Seconde guerre mondiale.
Ceux qui appliqueraient des lois abjectes, commanditant des génocides, sans jamais s'y opposer, deviendraient des monstres, tels les nazis. On a pu le voir lors du procès Eichmann, un homme responsable des milliers de déportations. Ainsi la pire des horreurs est née d'une obéissance à la loi, d'ailleurs ce fonctionnaire allemand s'est toujours senti justifié puisque pour lui il n'avait fait "qu'obéir". Le tyran , morcelle les responsabilité pour se faire obéir. Il recrutera des "petits" tyrans, des fonctionnaires, qui auront chacun une tâche banale à exécuter et chacun éxecutera cette tâche avec compétences, sans remords. Personne ne se rend compte qu'il est un maillon de l'acte final, l'obéissance est rendue facile et confortable.
EICHMANN : Je déclarerai pour terminer que déjà, à l’époque,
personnellement, je considérais que cette solution violente n’était pas
justifiée. Je la considérais comme un acte monstrueux. Mais à mon grand
regret, étant lié par mon serment de loyauté, je devais dans mon secteur
m’occuper de la question de l’organisation des transports. Je n’ai pas
été relevé de ce serment.
Je ne me sens donc pas responsable en mon for intérieur. Je me sentais dégagé de toute responsabilité. J’étais très soulagé de n’avoir rien à faire avec la réalité de l’extermination physique. J’étais bien assez occupé par le travail que l’on m’avait ordonné de prendre en charge. J’étais adapté à ce travail de bureau dans la section, j’ai fait mon devoir, conformément aux ordres. Et on ne m’a jamais reproché d’avoir manqué à mon devoir.
Extrait des séances du procès Eichmann (1961)
Je ne me sens donc pas responsable en mon for intérieur. Je me sentais dégagé de toute responsabilité. J’étais très soulagé de n’avoir rien à faire avec la réalité de l’extermination physique. J’étais bien assez occupé par le travail que l’on m’avait ordonné de prendre en charge. J’étais adapté à ce travail de bureau dans la section, j’ai fait mon devoir, conformément aux ordres. Et on ne m’a jamais reproché d’avoir manqué à mon devoir.
Extrait des séances du procès Eichmann (1961)
C'est également sur ce modèle que s'est développé ce type d'éducation, où les enfants doivent faire preuve d'une soumission absolue à l'autorité parentale, avec une totale négation de soi.
C était LE modèle d'éducation du 19ème siècle en Europe.
C était LE modèle d'éducation du 19ème siècle en Europe.
A titre anecdotique, c'était aussi le modèle auquel j'ai eu droit au sein de ma famille.
Ainsi, il n'était pas rare que je sois "frappée", mes parents espérant que cette forme de punition m'inciterait à mieux obéir, à mieux apprendre si je me trompais, ou si je désobéissais.
Toutefois, si obéir est l'emprisonnement de sa conscience, de sa liberté individuelle, est-ce pour autant que désobéir serait de les gagner?
Pas certain, car en désobéissant on se soumet tout autant, à son ego, à ses passions, ce qui est aussi une forme d'emprisonnement en soi.
Alors, on doit obéir ou désobéir?
La réponse se trouve dans l'étymologie même du verbe obéir:
Depuis le latin "oboedio"Du verbe latin "oboedire" signifiant "prêter l'oreille". Obéir ou "ob-audire"
Composé du préfixe latin "ob" et
"audio" (verbe latin "audire "),
issu du grec "aiô" ("αιω") "aisthanomaï"
("αισθανομαι")
"percevoir par les sens", "percevoir par l'intelligence",
"comprendre"
Obéir dans ce sens c'est avant tout être à l'écoute envers le monde, envers autrui, envers le réel.
Cela peut aussi bien être l'adversité, ce qui s'oppose à moi ; l'inattendu, ce qui déjoue
mes plans, mes projections mentales ; l'altérité d'autrui, qui excède
mon savoir et mes prises de possessions. Obéir, c'est l'ego qui s'ouvre à
ce qui le transcende, et c'est pourquoi la véritable obéissance permet
un dépassement de l'ego.
Ce qu'on prend pour de l'obéissance n'est donc souvent qu'une surdité
à tout ce qui ne correspond pas à notre représentation du bien ,
c'est-à-dire à l'autre, à tout ce qui n'est pas nous.
Ainsi le fanatique croit-il obéir à Dieu, quand il ne se soumet en fait qu'à sa propre représentation mentale, au nom de laquelle (“obéissez-moi, car j'obéis à Dieu”) il devient un tyran.
Celui qui croit obéir en se soumettant à une idée est en fait un tyran de soi-même, et un tyran des autres : car il somme le réel d'obéir à son idée.
Mais à l'opposé, celui qui prétend ne jamais obéir n'est souvent que l'esclave de ses propres penchants, le prisonnier de son ego. Le véritable obéissant, qui est à l'écoute à la fois de la réalité des situations qu'il rencontre et de l'être qu'il est, sait dire “non” lorsqu'une demande ne lui semble pas juste. .
Ainsi le fanatique croit-il obéir à Dieu, quand il ne se soumet en fait qu'à sa propre représentation mentale, au nom de laquelle (“obéissez-moi, car j'obéis à Dieu”) il devient un tyran.
Celui qui croit obéir en se soumettant à une idée est en fait un tyran de soi-même, et un tyran des autres : car il somme le réel d'obéir à son idée.
Mais à l'opposé, celui qui prétend ne jamais obéir n'est souvent que l'esclave de ses propres penchants, le prisonnier de son ego. Le véritable obéissant, qui est à l'écoute à la fois de la réalité des situations qu'il rencontre et de l'être qu'il est, sait dire “non” lorsqu'une demande ne lui semble pas juste. .
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